BREST-MENTON

Le compte rendu qui suit est paru dans La Revue de Audax n°480 en octobre 1980. Le texte est reproduit intégralement sans aucune modification bien qu'à la lumiére de l'expérience acquise depuis cette date l'auteur aurait pu être tenté d'en améliorer à la fois le contenant et le contenu.


Traverser la France en diagonale m'a toujours fasciné. En vélo bien sûr!
Médaille des Diagonales
En voiture cela me paraît n'avoir aucun intérêt. A la rigueur on pourrait envisager cette balade à pieds, à cheval ou en deux roues à moteur. Le vélo est vraiment le moyen idéal: pas trop lent, pas trop rapide, ni bruyant, ni odorant...M'étant déjà essayé dans cet exercice sur Strasbourg-Hendaye, il y a deux ans (voir le compte rendu dans la revue des AUDAX n° 474), je n'avais qu'une envie : recommencer. En 1980, les Diagonales de France ont 50 ans. C'est, en effet, du 13 au 18 avril 1930 que, sur une idée de Vélocio, mise en œuvre par Philippe Marre, que Georges Grillot et Roger Coffier effectuaient pour la première fois Brest-Menton en tandem. Donc, en cette année 1980, le choix de ce trajet, parmi les  neuf  diagonales, s'imposait. Il faut bien convenir que si Brest-Menton est la plus longue des diagonales, c'est aussi certainement une des plus touristiques. En tout cas c'est une vraie diagonale, ceci par comparaison avec des Brest-Perpignan ou Hendaye-Menton.

LA PREPARATION MATERIELLE

La préparation matérielle a été sensiblement identique à celle de ma précédente diagonale. Elle a commencé en hiver, période de relative inactivité cycliste, durant laquelle je rêve de grands espaces, de soleil, de montagnes (non enneigées). J'ai commencé par prendre la carte Michelin n° 989 sur laquelle j’ai joint (il faut une très grande règle) d'un trait Brest-Menton. Puis, je suis parti à la recherche, sur des cartes plus détaillées (au 1/200000 ème), de l'itinéraire se rapprochant le plus de cette droite. Mais attention ! Le minimum de grandes routes, le maximum de lieux touristiques. Les grandes routes sont faciles à repérer : elles sont en rouge sur les cartes. Pour les lieux et routes touristiques, c'est plus difficile. Il y a bien les bordures vertes sur les cartes Michelin ainsi que la couleur, blanche ou jaune, de la route elle-même. Pour le reste, on peut consulter les innombrables guides touristiques (on en voit, là aussi, de toutes les couleurs : rouge, bleu, vert...). Pour un cyclo, membre de la FFCT, le plus simple est de consulter la liste des sites contrôles de Brevet du cyclotourisme national (BCN) et de Brevet des provinces françaises (BPF). Pour faciliter ma tâche, j'ai reporté sur ma carte Michelin n° 989 tous les points contrôles BCN-BPF. C'est comme cela que je suis passé par quinze BCN-BPF dont Josselin (Morbihan), Montreuil-Bellay (Maine-et-Loire), Crozant (Creuse), La Chaise-Dieu  (Haute-Loire), Saint-Agrève(Ardèche), la Motte-Chalançon (Drôme) et Gréolières (Alpes-Maritimes) pour citer ceux qui m'ont paru les plus pittoresques. 
Le parcours étant fait, il totalisait 1 385 km, ce qui est 15 km de moins que l'itinéraire de référence mais 25 km de plus que le plus court. Il faut avouer que ma méthode de préparation ne me pousse pas vers le plus court. Dans les Alpes, je n'ai pas pu éviter complètement la route Napoléon entre Serres et le Logis du Pin. Ne voulant pas la prendre intégralement, j'ai joué à Bison futé, ce qui m'a valu de faire une dizaine de kilomètres en plus... et prendre un chemin de terre. Tous les chemins mènent à Rome... c'est connu. Je peux vous dire que tous les chemins mènent aussi à Menton. Les étapes étaient les suivantes : Brest - Champtoceaux (313 km), Champtoceaux - Dun-le-Palestel (294 km), Dun-le-Palestel - La Chaise-Dieu (251 km), La Chaise-Dieu - La Motte-Chalançon (242 km)et pour finir La Motte-Chalançon-Menton (285 km). Tous les hôtels avaient été réservés et payés à l'avance. Je m'arrêtais toutes les nuits pour un minimum de 9 heures et ne roulais, pour ainsi dire, pas de nuit. L'exception étant faite pour les départs matinaux (entre 4 h 50 et 6 h 30 suivant les jours). Le soir, je suis arrivé, au plus tard, à 21 heures. Itinéraire

 L'ENTRAINEMENT

II ne suffit pas de s'inscrire à une Diagonale pour la réussir. La réussite dans ce genre d'exercice dépend évidemment de la préparation matérielle mais aussi de la condition physique. Un bon entraînement est donc nécessaire. Pour fixer les idées, disons tout de suite qu'à la veille du départ, j'avais 5500 km dans les jambes depuis le début de l'année. Il me fallait être en forme au bon moment. A mi-juillet, j'ai effectué le brevet des Cimes stéphanoises. C'est une magnifique randonnée dans laquelle on rencontre une variété de paysages et quelques cols (21). J'y ai rencontré M. et Mme Bastide. J'ai appris, ensuite, que Le Lourec y avait participé. En tous cas, c'est une balade que je vous recommande. Elle est issue d'une recette simple : vous prenez une belle région, vous choisissez des routes tranquilles, vous en sélectionnez quelques-unes un peu (ou beaucoup) pentues... Ensuite, il ne reste plus qu'à organiser. Ce n'est malgré tout pas avec cela qu'on peut être prêt pour une diagonale.
 Quinze jours après, je me transformais en « fléchard » sur le trajet Brest-Paris. Pour parfaire ma forme, je décidais de le faire d'une seule traite. Je comptais sur le vent favorable et le beau temps... Ce qui semble normal pour cette période de l'année. En fait de beau temps, j'ai eu plus de 100 km de pluie au départ. Le vent m'a bien poussé un peu. Si peu que les plus fines herbes étaient désespérément immobiles dans la plaine entre Mortagne et Châteauneuf-en-Thimerais. Comme je suis chasseur de BPF et de cols, je me suis payé (ce n'est pas très cher), un petit détour par le col de Saint-Sulpice et Saint-Léonard-des-Bois. Je suis très fier : j'ai monté tous les cols de la Mayenne. Il n'y en a qu'un, celui de Saint-Sulpice (193 m). Comme il faut battre le fer quand il est chaud, le week-end suivant j'étais inscrit pour un brevet de 1 000 km randonneur. Je pensais, à juste titre, que c'était la meilleure préparation pour une diagonale. Si je réussissais ce 1 000 km, Brest-Menton était « dans la poche ». Je m'étais fait un itinéraire extra-touristique : Blois - Sainte-Foy-la-Grande (464 km), Sainte-Foy-la-Grande - Toulouse (300 km), Toulouse - Foix (240 km) par 16 BPF-BCN et deux cols dont le Pas du Sant (409 m. de dénivelle en 4 km) que je vous le recommande. Saint Sulpice
Ce brevet me laisse des souvenirs analogues à Paris-Brest-Paris quant à la difficulté mais avec le paysage en plus. Je devrais dire avec la variété de paysages. En effet, j'ai traversé successivement le Val-de-Loire, les vignobles bordelais, la plaine de la Garonne, les coteaux du Gers, les monts du Sidobre, la Montagne Noire, des plaines grillées, entre Castelnaudary et Mirepoix et les contreforts pyrénéens. En fait, j'ai plus souffert de la chaleur à laquelle le début de cet été nous avait peu habitués que de la difficulté du parcours. Après ce brevet de 1000 km, j'étais fin prêt pour la diagonale.

BREST-MENTON

Le jeudi 14 août au petit matin, j'étais donc en train d'errer dans les rues de Brest à la recherche d'un petit-déjeuner. Après m'être fait « jeter » du « Tonnerre de Brest » qui n'a pas voulu me servir un thé au lait sous prétexte qu'il ne faisait que snack-bar, je me suis retrouvé sur la place du marché où le patron d'un bar ouvert la nuit a accepté de me servir un petit-déjeuner. Ce petit incident m'a permis de pointer au commissariat de police avec 20 minutes de retard. Aucune importance, la nuit était douce, le vent du sud-ouest, perpendiculaire, le moral au beau-fixe. En fait, il me le fallait ce moral car au bout de 100 km, j'avais 40 minutes de retard sur mon horaire. Entre temps, j'avais grillé mes deux ampoules simultanément et cherché un court-circuit   imaginaire.  Heureusement, je possède toujours des lampes de rechange mais j'ai mis un certain temps pour diagnostiquer la cause de mon manque d'éclairage. Depuis près d'un an, je roule de nuit avec une dynamo Sanyo. C'est une petite merveille : elle freine très peu, ne fait pas de bruit, éclaire très bien... trop bien car je grille des ampoules souvent (environ toutes les 20 heures — 3 nuits). En tous cas, cela revient moins cher que les piles et il y a moins de faux contacts. Autre cause de mon retard : les éleveurs de porcs avaient barré la route dans les environs de Daoulas (3 km de détours).
Josselin
L'action conjuguée du vent qui, sans me venir de l'arrière exactement, me poussait et d'un repas rapide pris dans un libre service à Pontivy m'a permis de retrouver mon horaire vers Josselin au km 177. J'ai conservé ensuite mon horaire jusqu'à Champtoceaux terme de ma première étape.
Pourtant les quelques averses d'orage dont il a fallu que je m'abrite m'avaient un peu retardé. Cet horaire, je l'avais calculé sur une moyenne, hors arrêt, comprise entre 16 et 24 km/h, selon le relief. Mon développement de base était de 5,10 m avec le maximum (descente, vent dans le dos) de 7,28 m et minimum de 2,91 m. En fait, je dispose encore d'un développement plus petit (2,45 m) mais je ne l'ai jamais utilisé.
J'étais donc à l'heure à l'arrivée de la première étape. Bien qu'il n'y ait aucune relation de cause à effet, je l'étais aussi au départ de la deuxième. A Bouzillé, le boulanger accepta de pointer mon BPF avant 7 heures. C'est bien la seule corporation sur laquelle on peut compter à une heure aussi matinale. A ce propos, j'ai souvent eu des problèmes pour prendre un petit-déjeuner à moins de 8 heures. Ensuite le vent m'a poussé. Le ciel était nuageux, un temps idéal pour un cyclo. Pour le repas de midi j'étais à Loudun  avec   vingt-cinq   minutes d'avance. Cette avance ne fut pas sans conséquence : il était midi moins le quart lorsque je voulus manger. A l'hôtel du Cheval Blanc, dont le propriétaire est un cyclo, j'ai quand même pu repartir après une heure d'arrêt seulement. Je prenais tous mes repas au restaurant. A midi, je m'arrêtais entre 45 minutes (le cas du libre service de Pontivy) et une heure et demi. Je choisissais un menu simple aux environs de 30 F. Le soir j'avais un peu plus de temps et je mangeais (et buvais) un peu plus copieusement. A Saint-Benoît-du-Sault (BCN-BPF Indre), je suis tombé (rassurez-vous, je n'ai pas eu très mal si ce n'est aux oreilles) sur la fête locale. Que de monde! La traversée en vélo a d'ailleurs été impossible. Cette diagonale comporta donc1 384,5 km en vélo et 500 m à pieds.
Bergez
 A Crozant, vers 20 heures, je retrouve M. et Mme Bergez et leur ami Jacky, de Saint-Sulpice-le-Dunois. C'est, pour moi, après le pot de l'amitié, une grande joie de pédaler avec Christian et Jacky. Ces moments, à la tombée du jour, font partie de ceux qui resteront gravés dans ma mémoire comme d'excellents souvenirs. Christian me demande si, voyant sa femme nous doubler avec la 504 grise bien connue de nos pelotons, je n'ai pas l'impression de faire Bordeaux-Paris. C'est effectivement un peu cela mais la foule en moins et le paysage de la Creuse en plus. Le soir nous mangeons tous ensemble dans la résidence creusoise de nos amis. Les discussions cyclistes vont bon train. Il est un peu tard quand ils me raccompagnent à l'hôtel. Aucune importance... il vaut mieux sacrifier une demi-heure de sommeil et avoir le moral au plus haut.
Le troisième jour commence par ce qui aurait pu être un incident fatal. Pour bien le comprendre, il faut savoir que j'ai la bonne (ou mauvaise) habitude d'user mes pneus jusqu'à la toile. Au départ de cette diagonale, le pneu arrière avait 5500 km. Généralement, mes pneus, à l'arrière, font 7000 à 7500 km, le double pour l'avant. Il s'agit de super-randonneur Wolber (650 x 35). Avant de partir, je les avais soigneusement examinés. J'en avais conclu qu'ils feraient bien encore la diagonale. Donc au départ de Dun-le-Palestel, à la dynamo, mon attention a été attirée par un « petit bruit ». Après examen de mon pneu arrière, je me suis aperçu que je roulais sur la toile. Ma chance est de m'en être aperçu. La solution a été simple : une pièce à bord mince fut collée sur la bande de roulement. Je vous signale que ce genre de remède est beaucoup plus solide que je le supposais. Au bout de 350 km, j'ai trouvé, à Yssingeaux, un vélociste ayant un pneu me convenant et la pièce était encore en bon état. Cet incident clos, je progressai, doucement mais sûrement, à travers le Massif central.
Clermont-F
Après Pontaumur, où je déjeunai, le relief s'accentua vraiment, et ce jusqu'à Clermont-Ferrand via Pontigaud. La descente du col des Goules, que je n'avais pas encore faite, m'a particulièrement marqué. Tout d'abord par la pente (+ de 10 %) puis par la vue sur la plaine de l'Allier et la ville de Clermont-Ferrand.
Cette étape du Massif central est celle que je redoutais le plus car elle était longue (251 km) et très dénivelée (plus de 2000 m). Je partais surtout de 400 m pour arriver à 1 100 m.
Col des Goules

En fait. j'y ai maintenu mon horaire (18,2 km/h entre Saint-Dier d'Auvergne et la Chaise-Dieu). Si j'étais en retard de vingt minutes à l'arrivée, je le dois à une erreur de parcours sur les petites routes, du côté de Saint-Eloy-la-Glacière, la bien nommée.
La quatrième étape, bien que comportant aussi du relief, me semblait plus facile. Tout d'abord, elle était plus courte (242 km). Ensuite, je partais de 1 100 m pour arriver à 560 m. Bien sûr, il y avait quatre cols dont un à plus de 1 000 m. Je savais que je rencontrerai plus de 60 km de descente et de plat de suite dans les environs de la vallée du Rhône, lequel sera franchi à Valence. Le petit-déjeuner, à Vorey, je m'en souviendrai. J'ai payé 14 F un pot de thé, avec du lait, une demi-baguette avec du beurre directement dans le paquet et de la confiture également directement du pot. N'allez pas croire que c'était dans un hôtel 3 étoiles. Heureusement les paysages de l'Ardèche étaient là pour me réconforter. Entre Tence et Saint-Agrève, j'ai suivi le tracé du petit train touristique. Nous allions sensiblement à la même vitesse. Sur le plat, il me distançait mais dans les montées il soufflait plus que moi. J'avais, quand même, un avantage sur lui : je ne sifflais pas à chaque passage a niveau. Après m'être promené pendant près de 60 km entre 800 et 1 000 m, je suis redescendu à Lamastre à 350 m. Pour passer dans la vallée du Rhône, il me fallait cependant franchir le col des Fans (754 m). Contrairement aux journées précédentes, le temps était chaud et j'ai un peu souffert de cette canicule. Le déjeuner a été pris dans la montée de ce col à la terrasse d'un restaurant à laquelle était attablé un cyclo. Au vu de ma plaque de cadre, ce cyclo et par la suite les différents consommateurs m'ont soumis à la question puis m'ont chaleureusement félicité... Le moral qui était déjà haut est remonté « beau fixe ». La traversée de Valence n'a pas été aussi pénible que je le pensais. Cette ville est d'un calme étonnant, le dimanche après-midi quand il fait chaud. Ça m'a changé de l'arrivée d'un certain Paris-Valence de 1976 lors de la Semaine fédérale. Ensuite, le Mistral m'a poussé jusqu'à Crest. Je me suis cependant aperçu que lorsqu'il est violent, il n'est pas bon de s'éloigner de sa direction : à 45° arrière, il vous gêne plus qu'il vous pousse. Après Bourdeaux, je « m'enfonçais » dans les Alpes. Dans les cols de Lescou et de Pré-Guittard, les paysages sont magnifiques. Bien que ce ne soit pas très haut (1 000 m environ), la montagne est complètement nue et la route passe à travers de gigantesques éboulis de schiste... Je ne me rappelle pas avoir vu une habitation en 20 km. A 20 h 15, j'étais à la Motte-Chalançon pour ma dernière étape. A l'hôtel, L'Oustau de l'Aygues, les propriétaires et le personnel étaient très intéressés par mon périple. J'ai dû donc répondre à beaucoup de questions et, en retour, ils m'ont particulièrement bien soigné. La dernière étape a commencé bien tôt (avant 5 heures). Mon idée était de prendre le maximum d'avance car je ne voulais pas arriver trop tard à Menton. J'ai, en effet, des amis à Cannes et je ne pouvais pas aller aussi près de chez eux sans passer les voir. Hélas, mon lever matinal n'a pas servi à grand chose. Dans la nuit noire, par manque d'indication, je me suis engagé sur une mauvaise route. Après être monté pendant près de 5 km, je me suis aperçu que la vallée devait se situer à gauche de la route alors qu'elle était à droite. D'autre part, la pente n'aurait pas dû être aussi forte. Je suis donc redescendu, furieux contre moi-même, à la Motte-Chalançon, ayant perdu plus d'une demi-heure au départ. Cet incident m'avait donné des ailes et la montée du col des Tourettes (1 126 m), magnifique à l'aube, a été rapidement faite (si l'on peut dire car je développais 2,91 m). La descente sur Serres, ensuite, fut très rapide (18 km en 32 minutes). Là, je retrouvais la route Napoléon. Malgré l'heure matinale, 7 h 20, le trafic y était intense.
Chemin de terre
 Je l'ai rapidement quittée pour une route parallèle. Après Malijai, j'empruntai un chemin de terre. J'avais entendu dire qu'un des inconvénients des diagonales était d'avoir à prendre des grands axes de circulation. Sur ce chemin, je pensais à cela et à ne pas crever. Voulant garder un souvenir de ce moment, je photographiais le chemin lorsqu'un âne arriva... Il semblait très intéressé par mon vélo. Il a d'ailleurs commencé à manger mes gaines de frein. Ane
Après avoir franchi le col de Lèque (1 146 m), sommet de cette diagonale, je descendais  sur Castellane. Là, je trouvais Louis Cointepas qui roulait, souvent en tandem, avec mon beau-père dans les années 35. Après un bon déjeuner ensemble, nous repartîmes vers le col de Luens.
Avec Cointepas
 Nous étions bien heureux de rouler ensemble. C'est un peu, cette rencontre, celle de deux générations de diagonalistes. Louis Cointepas a effectué ce Brest-Menton en 1935. Il y a, déjà, quarante-cinq ans. A 76 ans, il monte les cols comme beaucoup de jeunes aimeraient le faire. Il pense que le vélo c'est la santé. Je ne sais pas si c'est vrai, en tout cas j'aimerais bien pouvoir, à son âge, faire, comme lui, 200 km de montagne en une journée. Dans le col de Luens, j'ai eu un saut de chaîne... Il m'a fallu près de 2 km pour le rejoindre. Tout en bavardant tous deux, nous avancions. Le temps m'a paru bien court jusqu'au sommet du col de Vence. Il faut dire que la connaissance qu'a Louis Cointepas de notre monde cyclo est remarquable. Et cela aussi bien des randonnées— il a fait, entre autres, quatre diagonales — que des cyclos eux-mêmes. C'est un peu triste que je le quitte au sommet du col de Vence. La descente me consolera. Elle est très roulante, comparable à celle de l'Aspin, du côté Arreau.
Les 45 km qui restaient n'ont pas été très agréables : j'ai eu l'impression de traverser Paris. J'ai bien vu la mer de temps à autre, les palmiers de la promenade des Anglais, mais surtout de la voiture, de la voiture, et ce en file incessante. Cela m'a paru interminable... Pourtant j'avançais à près de 23 km/h de moyenne ce qui n'est pas si mal en ville et avec le relief. A Menton, c'était la fin de la belle aventure. Que de souvenirs ! Dès le lendemain, je cherchais quelle diagonale j'allais bien pouvoir faire la prochaine fois. Ce sera Dunkerque-Perpignan ou Brest-Strasbourg. A bientôt !

Dominique DESIR. Août 1980
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